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L’histoire d’Alec : quand le coût élevé de l’insuline détruit des vies

L'abordabilité de l'insuline est un sujet qui tient à cœur à Nicole Smith-Holt pour une raison bien précise. En 2017, son fils adulte est décédé d'une acidocétose diabétique (ACD) parce qu'il ne pouvait pas se permettre d'acheter de l'insuline.



Nicole Smith-Holt protest high cost of insulin
Photo courtesy of T1International and Bob White

Le 27 juin, Elizabeth Rowley, fondatrice et directrice de T1International, a participé à la conférence Affordable Medicines Now organisée par Public Citizen à Washington D.C. (États-Unis). Elle a lu la déclaration suivante au nom de Nicole Smith-Holt, défenseur engagé de l’insuline à prix abordable pour tous. L’abordabilité de l’insuline est un sujet qui tient à cœur à Nicole pour une raison bien précise. En 2017, son fils adulte est décédé d’une acidocétose diabétique (ACD) parce qu’il ne pouvait pas se permettre d’acheter de l’insuline.

Public Citizen m’a contactée en avril pour me demander de participer à une conférence sur l’accès aux médicaments organisée en juin. J’ai répondu que ce serait avec plaisir pour autant que cela concorde avec mon calendrier et rentre dans mon budget. Quelques semaines plus tard, ils m’ont envoyé un lien vers de plus amples informations sur la conférence et un accès au calendrier. J’ai eu un coup au cœur en voyant les dates. Le 27 juin est la date du premier anniversaire de la mort d’Alec.

Il est probable que certains d’entre vous qui participez à la conférence ne me connaissez pas, pas plus que vous ne connaissez mon fils Alec Raeshawn Smith. Permettez-moi de dresser un rapide portrait d’Alec.

Alec venait d’avoir 24 ans en mai 2015 quand son diabète de type 1 a été diagnostiqué. Dire que nous avons tous été choqués serait en dessous de la vérité. J’étais terrifiée, j’avais tellement peur pour lui. Il a semblé prendre le diagnostic assez bien. Bien sûr, il a traversé une période durant laquelle il se demandait « pourquoi moi ? », mais il a rapidement rebondi et pris son diagnostic très au sérieux. Il a consulté son spécialiste en diabète et son diététicien et a apporté des changements à son mode de vie et à son alimentation, de même que sur le plan mental. Il s’en sortait très bien en tant que nouveau patient atteint de diabète. J’étais vraiment fière de le voir surmonter ces défis la tête haute et avec engagement. Il devait prendre sa condition au sérieux car il avait une petite fille, qui avait besoin d’un papa en bonne santé.

Venons-en rapidement à 2017 : Alec a eu 26 ans le 20 mai 2017, ce qui signifiait qu’il ne pouvait plus être couvert par mon assurance maladie. Le 1er juin 2017, il est officiellement devenu non assuré, et j’étais terrifiée !!! Plusieurs mois auparavant, nous avions cherché en ligne une assurance au titre de la loi sur la protection des patients et les soins abordables (Affordable Care Act, ACA) et avons découvert qu’il gagnait trop pour bénéficier d’une subvention ou d’une assistance médicale. Nous avons été contraints de chercher une assurance sur le marché. Je n’en ai pas cru mes yeux en voyant les prix des polices sur ce site : nous n’avons trouvé que des plans à prime élevée et avec un plafond donnant droit à déduction élevé. Alec envisageait de souscrire une police qui lui coûterait 450 USD par mois, avec un plafond donnant droit à déduction de 7 600 USD. Après avoir jonglé avec les chiffres et son budget, nous nous sommes rendu compte que ce plan était hors budget.

À l’époque, nous pensions qu’il devrait débourser environ 1 000 USD de sa poche chaque mois pour payer l’insuline et les fournitures, ce qui signifie qu’il devrait payer sa prime de 450 USD par mois plus les dépenses de sa poche pendant au moins 7 mois avant que l’assurance n’intervienne. Après avoir vu ces chiffres, Alec a décidé de se passer d’assurance et de payer directement à la pharmacie jusqu’à ce qu’il trouve un emploi proposant une assurance.

Alec a survécu 27 jours seulement après avoir été éjecté de mon assurance de soins de santé. Alec s’est rendu à la pharmacie en juin, aux alentours de 20, pour remettre sa prescription d’insuline et acheter les fournitures nécessaires. Le pharmacien lui a dit qu’il en avait pour un montant total de 1 300 USD. Il s’attendait à devoir payer 1 000 USD et n’avait pas les 1 300 USD. C’est ainsi qu’il est reparti sans son insuline. Il a été retrouvé mort seul sur le sol de sa chambre le 27 juin à 17h20. Mon fils est mort d’une acidocétose diabétique (ACD) parce que le prix de son insuline, indispensable pour le maintenir en vie, était inabordable !!! Nous pensons qu’Alec essayait de faire durer au maximum sa dernière dose d’insuline jusqu’au jour de paie, le 30 juin. Des stylos complètement vides ont été retrouvés dans tout son appartement. Malheureusement, le médecin légiste a emporté les kits d’insuline en même temps que le corps, de sorte que nous n’avons pas pu vérifier s’il restait de l’insuline dans son dernier stylo.

Avant le décès d’Alec, nous ignorions qu’il existait une communauté en ligne du diabète. J’aurais aimé connaître l’existence de cette communauté, des ressources, de la sensibilisation et du soutien disponible. Si nous avions été au courant, peut-être serait-il toujours en vie. Il y a tellement de si – de choses que nous aurions faites autrement si seulement nous avions su. Si seulement l’insuline était vendue à un prix abordable. J’ai le cœur brisé quand j’entends parler des combats quotidiens menés pour obtenir de l’insuline. Nous devons continuer à mener cette rude bataille pour empêcher des décès tels que celui d’Alec. L’insuline est considérée comme un médicament essentiel et devrait être traitée comme telle. Aucune personne atteinte de diabète ne devrait se ruiner pour acheter de l’insuline, encore moins mourir à cause du coût de l’insuline. Le diabète est déjà suffisamment stressant du fait qu’il faut le gérer 24 h sur 24, 7 jours sur 7. Il ne devrait pas être permis de stresser à cause de son coût. Il ne devrait jamais être nécessaire de rationner l’insuline et ses fournitures.

J’aurais aimé que vous rencontriez Alec. C’était un jeune homme aimant, bienveillant, un peu fou, plein d’humanité, aventureux, généreux et persévérant. Il aimait la vie et l’aventure. Il n’était pas du genre à s’asseoir et à se décourager à moins d’être en train de faire du camping ou autour d’un bon feu. Il aimait la vie en plein air et s’adonnait souvent au camping ou à la randonnée, à la pêche, au canotage, quand on ne le retrouvait pas en train de faire un barbecue au pied levé lorsque son calendrier de travail chargé le lui permettait. Il adorait la musique et était constamment en quête d’un concert ou d’un spectacle auquel assister. Il était fan de sport. Il a joué au baseball, au basketball et au football tout au long de ses années de lycée et était un assidu des matchs de football des Vikings du Minnesota, des matchs de baseball des Twins et des matchs de hockey des Wild du Minnesota.

Alec aimait voyager. Il aimait découvrir de nouveaux endroits et de nouvelles cultures. Il était tombé amoureux des Caraïbes et s’était fixé pour objectif de visiter les 25 îles. Malheureusement, il n’a pas en voir que sept. La plupart des amis d’Alec l’appelait Big Al. Il avait connu un pic de croissance pendant ses années de lycée et mesurait 1,93 m en deuxième année. C’était un gros nounours. Alec arborait toujours un sourire sur son visage – c’était un large sourire – et il distribuait toujours des étreintes. Ses étreintes sont une des choses qui me manquent le plus.

Alec manque à tellement de gens, sa famille, son cercle étendu d’amis et sa fille Savannah, aujourd’hui âgée de 5 ans. Mon plus jeune fils, Jamisen, a 14 ans et admirait beaucoup son grand frère. Alec était son idole, il était tout pour lui. Ma vie a changé à tout jamais le 27 juin 2017.

J’aurais aimé être présente avec vous tous à cette conférence mais j’ai vraiment besoin d’être avec ma famille et mes amis proches en cette journée difficile. Je vous admire tous de poursuivre le combat, de consacrer autant de temps et d’énergie à cette cause. Je suis en admiration devant nombre d’entre vous, je puise beaucoup de connaissances de vous tous et je les utilise pour alimenter mon combat. J’espère que cette conférence vous offrira davantage d’outils et de ressources pour vous préparer à la bataille et finalement remporter ce combat. Nous devons nous lever et nous battre contre la cupidité et les bénéfices excessifs des grandes sociétés pharmaceutiques. Je fais le serment de continuer à partager l’histoire d’Alec et de poursuivre le combat pour atteindre notre objectif d’un accès à de l’insuline à prix abordable pour toutes les personnes atteinte de diabète de type 1. #insulin4all.

 

Elizabeth Snouffer est rédactrice de Diabetes Voice

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